2006-08-28
Vous savez, je n’ai pas toujours été ce vieillard fumant la pipe au coin du feu et racontant des histoires à tous les enfants de la contrée. J’ai navigué de par les mers les plus sauvages, les océans les plus lointains. J’ai même été mousse à bord du Blanc-Canon, le terrible vaisseau du redoutable N’Oeil-le-Borgne, le dernier grand écumeur des mers du Sud !
Vous avez sans doute tous entendu les légendes qui coururent sur sa cruauté, son autorité et son art du combat. Pour avoir pu les vérifier de mes propres yeux, je peux vous assurer que toutes ces rumeurs sont parfaitement fondées. Toutes. Toutes sauf une..
On entend souvent que personne n’a jamais connu ni prononcé le nom de baptême de N’Oeil-le-Borgne. N’a-t-il pas été élevé par une tribu de sauvages ? L’Histoire retiendra donc N’Oeil-le-Borgne comme celui-qu’on-ne-peut-nommer et nul doute que ça lui fasse particulièrement plaisir. Mais ce n’est pas tout à fait exact.
En effet, ayant été par hasard de service dans sa cabine lors de plusieurs repas auxquels il invita Olivier Le Hardi, dit Oli, un ami d’enfance ayant séjourné plusieurs années en Angleterre, je pus surprendre certaines informations à partir desquelles j’ai reconstruit la vie du grand homme.
Il y a de cela maintenant presque 100 ans, Monsieur et Madame Marine donnèrent naissance à un petit Sébastien dans un port anonyme de la côte. Avec un nom de famille si prédestiné, il eut été bien étonnant que le jeune Sébastien ne fasse pas dès le plus jeune âge montre d’un vif intérêt pour la mer et la navigation. Déjà tout petit il aimait fouiller dans le matériel de pèche de son père et un hameçon négligemment laissé sur la table lui coûta un oeil durant sa cinquième année. À 15 ans, il s’embarqua définitivement comme matelot à bord d’une frégate avec son ami et compagnon Oli. Il ne devait plus jamais rentrer chez lui et le monde perdit à jamais la trace de Sébastien Marine. Quelques années plus tard, Olivier Le Hardi débarqua en Angleterre après un long séjour dans certaines peuplades sauvages d’îles lointaines. Il s’installa en tant qu’armateur et fit fortune. Il faut bien dire qu’à cette époque, le monde marin commençait à craindre une menace qu’on croyait oubliée depuis plusieurs lustres : un aventurier, issu d’une peuplade indigène des Caraïbes et connu sous le nom de N’a-qu’un-oeil, commençait à écumer les mers à bord d’une corvette filant les 12 noeuds : le Blanc-Canon. Un fin marcheur que le Blanc-Canon ! Par un heureux hasard, les bateaux affrétés par Olivier Le Hardi n’eurent jamais à souffrir du moindre acte de piraterie, contrairement aux concurrents durement éprouvés par le sort.
N’a-qu’un-oeil relançait la mode de la piraterie et très vite il fût connu sous le nom de « N’Oeil-le-Borgne » ou « Capitaine N’Oeil » en raison de son infirmité. Les légendes les plus folles courraient sur son compte et l’on prétendait notamment que personne ne connaissait le vrai nom de ce mystérieux pirate. On alla jusqu’à dire que lui-même l’aurait oublié. Ses amis les plus intimes se contentaient de l’appeler N’Oeil.
Enfin, c’est ce qu’on dit…
Car j’ai très nettement entendu ce qu’à dit Olivier Le Hardi alors qu’en train de monter à l’échelle de corde, il aperçut N’Oeil qui se penchait au bastingage pour le saluer. Oui, quelqu��un a prononcé le vrai nom de N’Oeil-le-Borgne, je m’en souviens comme si c’était hier !
Moralité : Oui, Oli vit N’Oeil : « Hello Seb Marine »
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