2012-01-10 11:19:06
Par ERIC JOZSEF Rome, de notre correspondant
PortraitEconomiste aust re, le nouveau pr sident du Conseil s duit, malgr de
tr s s v res plans de rigueur. Car il incarne une certaine quit .
Ses adversaires politiques de la Ligue du Nord avaient bien pens qu il n
allait pas r sister le soir du r veillon. Que Mario Monti allait c der la
tentation de c l brer aux frais de la R publique son premier 31 d cembre dans
le fauteuil de pr sident du Conseil italien. Las, le tr s rigoureux professore
a fait savoir en d tail le nombre de personnes table (douze, tous membres de
sa famille), le menu (saucisson cuit et lentilles), le nom de la cuisini re (sa
femme) et l heure du coucher, minuit et quart. Tout juste l int ress a-t-il
conc d , sarcastique, ses opposants qui cherchent trouver la faille dans l
aust rit du personnage, qu il ne pouvait pas exclure, vu le nombre
relativement lev des h tes, de l gers surco ts en ce qui concerne la
consommation d lectricit , d eau et de gaz .
Mus es. Au passage, Mario Monti a rappel qu il a, au lendemain de sa
nomination la t te du gouvernement, le 13 novembre, en remplacement du tr s
bling-bling Silvio Berlusconi, renonc aux r mun rations pr vues pour le poste
de pr sident du Conseil . L ancien pr sident de l universit Bocconi de Milan
et ex-commissaire europ en ne force pas son talent pour incarner le p re aust
re qui demande de lourds efforts ses concitoyens pour sauver l Italie . Il
voyage en train plut t qu en avion, fr quente les mus es plut t que les salons,
ne hausse jamais le ton derri re ses petites lunettes, comme s il tait
convaincu qu il fallait rester gris quand la p ninsule broie du noir. Et pour l
heure, la recette fonctionne.
Le rem de de cheval impos par le professore Monti est aval . Pourtant, la
situation conomique a rarement t aussi sombre. Le taux de ch mage a atteint
8,6% et pr s d un jeune sur trois est sans emploi. La croissance est en berne.
Treize petits entrepreneurs se sont suicid s au cours des deux derniers mois
et, en raison de la cure d aust rit suppl mentaire de 30 milliards d euros,
les prix de l essence et plus g n ralement les imp ts ont augment . En d
cembre, l inflation a atteint 3,3%. Quant au d part en retraite, il a t
repouss par le nouveau gouvernement 62 ans pour les femmes et 66 ans pour
les hommes, malgr l opposition des syndicats, qui ont refait leur unit contre
le plan de rigueur de Mario Monti, jug in quitable . Selon un r cent sondage
du Corriere della Sera, 50% des Italiens craignent que 2012 soit conomiquement
encore pire.
Malgr cela, les sondages indiquent que le nouveau locataire du palais Chigi
conserve, si ce n est un tat de gr ce, un capital confiance. Arriv aux
affaires en novembre pour remplacer un Silvio Berlusconi d savou par les march
s, Mario Monti a b n fici d un pl biscite. Depuis l approbation des mesures d
aust rit , ce consensus s est effrit mais, selon une tude publi e le 31 d
cembre par le quotidien la Repubblica, plus des deux tiers des Italiens
estiment encore que la comp tence de Super Mario permettra d loigner le
spectre du d classement. Parce que c est un gouvernement technique, analyse le
politologue Ilvo Diamanti, auteur de l tude, Monti sait parler aux march s
dans une p riode o les march s dominent. Il sait parler aux Allemands dans une
Europe gouvern e par les Allemands. Les Italiens lui font confiance parce qu il
ne fait pas semblant d tre comme eux. Et d insister : Monti et le
gouvernement technique sont populaires justement parce qu ils sont impopulaires
, c est- -dire pr ts imposer des sacrifices.
lite . Alors que la caste politique italienne continue d tre honnie et
vilipend e, Monti et son cabinet repr sentent selon Ilvo Diamanti une lite
qui, bien que diverse et distante du peuple , fait son grand retour en raison
de sa comp tence, sa sobri t et son s rieux. Une lite laquelle on s adresse
avec le m me esprit que lorsque l on va chez le m decin quand a va mal . Dans
ce contexte, les attaques sur le pass du chef de gouvernement chez Goldman
Sachs n ont eu, pour l heure, que peu d effet. Surtout devant la cr dibilit
retrouv e de l Italie sur la sc ne europ enne, qui fait dire l ancien pr
sident du Conseil Giuliano Amato que nous ne sommes plus le Calimero de l UE .
Politiquement, et alors qu il doit n gocier au Parlement avec les trois grandes
forces h t rog nes qui le soutiennent (le PDL de Silvio Berlusconi, le Parti d
mocrate de Pierluigi Bersani et les centristes), Mario Monti a trouv une m
thode pour surnager : m contenter un peu tout le monde. Reste qu une partie de
la gauche, qui r clamait notamment un imp t sur les gros patrimoines, consid re
que les efforts demand s sont in galement r partis. En r ponse, le pr sident du
Conseil, qui a promis de mettre rapidement en uvre une deuxi me phase pour
faire repartir la croissance, vient de lancer une v ritable chasse aux
fraudeurs du fisc, avec notamment une descente spectaculaire des inspecteurs de
la brigade financi re dans la station de ski de Cortina d Ampezzo, le
Courchevel italien.
Pour le reste, il presse ses partenaires europ ens d agir au plus vite pour
renforcer la cr dibilit de la zone euro . L Italie a fait sa part , ne
cesse-t-il d sormais de r p ter, conscient que la tension politique et sociale
risque de monter au cours des prochains mois et que les efforts accomplis
risquent d tre vains si l Europe n intervient pas pour repousser une
ventuelle offensive des march s.