Message # 6 − Le coeur, la foi et la trahison

Il y a dans le coeur une trajectoire périlleuse, souvent sinueuse, qui mène vers de multiples chemins – parfois vers la foi.

Il y a dans la foi une trajectoire lumineuse, souvent sinueuse, qui mène vers de multiples chemins – parfois vers le coeur.

La trahison fracture le coeur et gangrène la foi.

La trahison brise le cercle du sacré.

Il en va de ce monde, de notre monde, de notre modèle de monde, de notre vision du monde, un monde qui change et qui tourbillonne, comme le monde a toujours fait. Un monde qui évolue, un monde qui dévalue, un monde qui rétrécit à force de vouloir grandir, un monde où tout est si sombre tellement il en devient clair. Un monde qui est prêt à tout dans sa quête de liberté, prêt à tout jusqu’à la sacrifier. Un monde en quête de vérité, quitte à la manipuler, la violenter, la déformer, la triturer et la violer. Un monde d’égalité ou une minorité peut imposer sa vision du monde à une majorité, laquelle ne s’est jamais privée pour l’écraser, cette minorité. Un monde de partage même si bientôt, il n’y aura plus rien à partager. Un monde interconnecté qui finit par isoler ses entités. Un monde basé sur le profit qui ne profite pas au monde. Un monde qui s’abîme à force d’être occupé. Un monde qui coule à trop naviguer. Un monde qui se raréfie à force de l’exploiter. Un monde...

Le monde moderne a érigé un nouveau Dieu.

Le monde moderne a fabriqué de nouvelles icônes, de nouveaux saints à vénérer, de nouvelles divinités à honorer.

Sur les ruines du monothéisme, les temples païens ont poussé et les extrêmes ont germé. Les grands penseurs de la mystique ont été lâchement récupérés. Leurs écrits ont été triturés à souhait pour de multiples intérêts. Leur parole déformée. Les souffles salutaires ont été étouffés. Les âmes desséchées ont alors trouvé de nouveaux refuges pour se prosterner.

Ils ne sont pas tous des fous, ou alors juste un peu. Tous ont cette honnêteté propre à l’esprit qui se dérègle, qui s’enlise et qui sombre. Ils sont fidèles à leur méthode, fidèles à leur schéma, à leur déconstruction programmée. Ils avancent à reculons, en parallèle, en décalage sur le chemin mystique. Ils sont antiques, bien sûr, et certainement déjà spirituels. Ils marchent droit, solides, déterminés, en phase avec leur croyance et les traiter par le mépris ne sert qu’à les renforcer. Ils sont les nouveaux prophètes d’une nouvelle religion. Leur folie est celle des hommes. Ils seront de tous les espaces médiatiques et c’est d’autant plus merveilleux que leur message deviendra notre histoire, un nouvel ordre de grandeur, qu’il nous faudra combattre jusqu’au-delà de la dernière extrémité. Les messagers seront notre folie, notre ennemi de l’intérieur.

Ce qui a pu donner le change si longtemps, c’est notre aptitude à noyer la honte individuelle dans le désordre collectif.

Nous étions de grandes âmes, un peuple fier et uni.

La trahison d’un seul à suffit pour ronger le coeur de toute une nation.

Plusieurs millénaires pour se construire, tant de misère et de sacrifices, tant de souffrances et tant de guerres.

Ai-je besoin de revenir, pour mémoire, sur notre passé trouble ?

Certainement oui, bien sûr !

Il reste donc à parler du sombre de l’âme, du noir profond de ses racines. Quelle beauté, n’est-ce pas ? Fabriquer des navires, avec comme intention première de les voir sombrer… En faire des épaves… Vint alors cet instant de non-retour, où tout chavire, sous l’affluence des sentiments personnels et de la solitude. Dans un esprit de résiliation généreuse, armé d’une folle imprudence, au centre d’un chenal aux bordures dorées, le plaisir de voguer comme l’on meurt… Par surprise et en douceur. La fabrication d’un naufrage se révèle être une tâche de bon augure. Quoi de plus honnête que de célébrer la chute. Qui a-t-il de plus grand et de plus fort que la faiblesse ? Nul ne s’attaque à celui qui agit sans défiance et qui se revendique faible et misérable – si tel est le cas néanmoins, alors nous basculons dans un autre chose, un autre de ténèbres… Nous basculons dans un autre de l’ordre de la barbarie.

Je ne crains pas les mirages, les illusions – et pourtant,

Tout le corps mystique est volatil à présent

Il s’évapore avec le courage comme la brume matinale

Car nous continuons aveuglément à être les fidèles

Des armes intellectuelles de pacotilles

Qui répudient avec virulence et conviction

Le message du mystère et du sacré

Que deviendra le monde sans Dieu, l’humanité sans spiritualité ?

Il nous faut une espérance divine !

La plus grande fatalité est celle de l’abandon, la résilience et la lâcheté de ceux qui n’ont plus faim.

− Vendredi 14 avril 2023