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Désobéir n'est possible que si celui a qui on désobéit croit que c'est lui qui a le pouvoir. Mais si on lui donne encore moins d'importance, son pouvoir diminuera d'autant, jusqu'à disparaître totalement : l'injonction devient juste illégitime, et hors de propos.
Ce n'est que lorsque tout le monde obéit docilement que le pouvoir perdure et devient total, donc totalitaire.
« Penser, c’est dire non. Remarquez que le signe du oui est d’un homme qui s’endort ; au contraire le réveil secoue la tête et dit non. Non à quoi ? Au monde, au tyran, au prêcheur ? Ce n’est que l’apparence. En tous ces cas-là , c’est à elle-même que la pensée dit non. Elle rompt l’heureux acquiescement. Elle se sépare d’elle-même. Elle combat contre elle-même. Il n’y a pas au monde d’autre combat. Ce qui fait que le monde me trompe par ses perspectives, ses brouillards, ses chocs détournés, c’est que je consens, c’est que je ne cherche pas autre chose. Et ce qui fait que le tyran est maître de moi, c’est que je respecte au lieu d’examiner. Même une doctrine vraie, elle tombe au faux par cette somnolence. C’est par croire que les hommes sont esclaves. Réfléchir, c’est nier ce que l’on croit. Qui croit ne sait même plus ce qu’il croit. Qui se contente de sa pensée ne pense plus rien. »
Alain, Propos sur les pouvoirs, § 139.