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Le mouvement multiforme que l’on appelle souvent pour le résumer le Libre ou la culture libriste s’est d’abord organisé pour des raisons notamment historiques¹ et structurelles² autour du logiciel libre, avec les quatre libertés définies par Richard M. Stallman en 1983.
Le logiciel libre a pour but de garantir que le pouvoir extraordinaire apporté par l’informatique reste entre les mains des usagers de cette informatique plutôt que de se concentrer entre les mains de quelques éditeurs de logiciels, et ultimement entre celles du détenteur du système d’exploitation dominant.
Et dans un même mouvement de permettre que la connaissance et l’innovation sur cette informatique se développe et se propage librement, faisant avancer l’humanité dans la maîtrise de son usage et de ses potentialités.
Par la suite, et notamment lorsque la numérisation de la plupart des productions intellectuelles (textes, musique, vidéos etc.) a concrétisé leur statut de bien non-rivaux, le mouvement s’est étendu à d’autres domaines culturels où la production collective de connaissances³ et d’œuvres d’art, ou simplement le partage libre de cet art, sont apparues comme favorisant le progrès de l’humanité.
Le libre est particulièrement utile pour l’éducation, via le partage de ressources pédagogiques accessibles à tous, l’amélioration continue et collaborative des parcours d’apprentissage, et la valorisation éventuelle des travaux des élèves lorsqu’ils peuvent atteindre une qualité suffisante.
Le logiciel libre est logiquement la base d’un enseignement de l’informatique bien pensé. En effet l’accès au code source de la totalité des outils utilisés permet à la fois de donner des exemples immédiatement compréhensibles aux étudiants mais surtout de démystifier complètement les outils informatiques, remplaçant une certaine appréhension quasiment irrationnelle de la « magie de l’informatique », extrêmement répandue dans la population⁴, par une compréhension complète des phénomènes matériels et intellectuels mis en œuvre et de la logique en étages d’abstractions successives de l’informatique.
Pour rappel, libre ne signifie pas gratuit : ces productions libres nécessitent un travail, et les conditions économiques de production de ce travail doivent être assurées. Il est le plus souvent légitime que ce travail soit rémunéré de façon équitable.
Vendre des produits libres est tout à fait légal dans le respect de la licence⁵, et de nombreuses personnes ou entreprises vivent du libre sur la base de modèles économiques diversifiés, plus ou moins éthiques selon les cas, mais entièrement compatibles avec le concept de Libre.
Notes :
¹ Le logiciel étant libre dès l’origine puisque né dans des cercles universitaires partageant l’idéal et les pratiques millénaires du savoir comme but en soi et de la production de ce savoir par l’échange public des idées et des connaissances. Les tentatives de captation du logiciel pour en faire une « propriété intellectuelle » privée sont donc apparues comme une « nouvelle enclosure » d’un bien commun constitué par un travail collectif. Par ailleurs la quasi-totale incompréhension technique du grand public et du personnel de gouvernement, à qui l’informatique a été le plus souvent médiée uniquement par les commerciaux liés aux fabricants de machines et aux éditeurs de logiciels privateurs, a amené à ce que les éditeurs s’arrogent des droits léonins au moment de l’écriture du nouveau droit des logiciels
² Le logiciel est le premier bien non-rival manufacturé à forte valeur économique, est exécuté (en tous cas avant l’ère du Cloud) sur la machine de l’utilisateur et donc pouvoir vérifier sa loyauté est fondamental, et se prête particulièrement bien à des modifications incrémentales (patchs, corrections de bogues et ajouts de fonctionnalités).
³ Wikipédia en fut un des premiers exemples, et son succès imprévu renvoyant au néant de l’obsolescence tous les équivalents privateurs fut un des moteurs de l’extension du Libre au-delà du logiciel.
⁴ Et sur laquelle surfent les commerciaux de l’informatique privatrice
⁵ Les licences Copyleft à clause non commerciale (NC BY SA par exemple), pour intéressantes qu’elles puissent être, ne sont donc pas des licences libres. Idem pour les licences à réciprocité.