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nous sommes
silhouettes sans grâce
d'argile ductile
images floues
derrière la vitre
nous sommes
ombres dansantes
sur l'instant indécis d'un matin
fendu cisaillé de pierre tranchante
nous sommes des paroles
qui en un jour s'Ă©tiolent
leur souffle seul demeure
sans mémoire
sans regret
nous marchons vers le soir
et le gris de nos vies disparaît dans la nuit
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à la lisière des crêtes
le jour ouvre un Ĺ“il bleu
les branches effarées se réveillent
d'un long engourdissement
le combat contre la brume opaque peut commencer
la colline hérissée nous donne la force
d'enfin déchirer les pesants nuages
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bleu blanc gris fondus noyés
le lourd drapeau du ciel
s'abat sur la montagne
la brume basse
renonce Ă s'Ă©lever
et terriblement traîne
les arbres cherchent eux aussi
à respirer la lumière
qui peine Ă percer les sommets
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on a parlé toute la nuit
au bord du fleuve autour du feu
assis sur le sable aux grains grossiers
entourés de nos sacs de couchage
que des riens sans importance
des saucisses des silences
le monde on l'a pas refait
juste être là ça suffisait
a-t-elle un instant souri
au milieu de la nuit
au bord du fleuve autour du feu
je ne sais plus
on a parlé toute la nuit
notre histoire Ă©tait finie
le jour venu
je suis parti
de cette nuit
on n'a plus jamais parlé
jamais plus
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Nuages
1
les nuages se dérobent
se déforment s'effilochent
laissent place Ă d'autres nuages
qui glissent eux aussi
dans le ciel sur l'eau
à la surface de la rivière
Ă contre-courant
debout au bord
sans mouvement
je regarde passer
le temps qui me reste
2
des fantômes pâles
dérivant à la surface
— nuages sur l'eau
près du bord je vois passer
les ombres du temps qui reste
3
fugaces nuages
sur l'eau noire du ruisseau
images passées
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nous sommes obstinés
nous sommes les arbres qui résistent
nos branches se gorgent d’espace incandescent
nos feuillages eux-mĂŞmes
savent braver l'orage
sous la puissance de nos racines
les roches Ă©clatent et se tordent
la falaise se fissure et s'Ă©croule
par une brèche violente
s’ouvre la lumière blanche
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pas possible
quelqu'un a dĂ» gratter une allumette
le mur fait profil bas
et le trottoir s'enfuit
sur le jour laiteux
il explose dans le blanc
le printemps dépasse les bornes
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flaques et filets d’eau
par mille sillons de sable
rejoignent les flots
mais pleins de désir pour le ciel
au loin
au-delĂ de l'horizon
s’élèvent vers les nuages
dans l’air ce sont
puissants ruisseaux
fumeuses cataractes
enfin libres
dans le vent
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dressées vers le ciel
elles enguirlandent les nuages
— fleurs rouges de rage
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marchant vers le fleuve
me revient des jours lointains
l'odeur d'aubépine
demain voleront les fleurs
au gré d'un vent sans pitié