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"-Tu trouves juste que tes impÎts servent à payer un service de santé obscur et puant?
-Je ne peux pas parler. Je suis en cdd."
Le film se déroule au Portugal en 2013.
Le pays est sous le coup des mesures d'austérité imposées par l'union européenne et s'enfonce dans la crise.
Voulant témoigner de cette misÚre sociale, un réalisateur entreprend de filmer la condition des travailleurs portugais.
Il souhaite filmer en parallĂšle ces ouvriers en dĂ©shĂ©rence rĂ©sistants comme il peuvent Ă la fermeture de leur chantier naval et la vie de cet apiculteur combattant seul l'invasion des guĂȘpes asiatiques qui tuent ses abeilles.
Mais gĂȘnĂ© par les autoritĂ©s du chantier naval et soudain frappĂ© d'une prise de conscience quant Ă la potentielle insincĂ©ritĂ© de son projet, le rĂ©alisateur quitte brutalement le tournage et son Ă©quipe.
Voulant échapper au jugement des membres du tournage qu'il a abandonnés, il invoque alors les mille et une nuits et Schéhérazade, qui reporte sa mise à mort en narrant des histoires au Grand Vizir.
Elle devient alors narratrice et nous conte plusieurs récits qui illustrent les difficultés du Portugal.
J'ai mis en exergue ce dialogue du film entre un vieux syndicaliste et une infirmiĂšre car il fait Ă©cho Ă une situation que traverse la France en ce moment.
J'ai un peu les mĂȘmes interrogations que le cinĂ©aste du film : comment peut on ĂȘtre heureux soi mĂȘme, lorsque sa situation personnelle pourrait presque le permettre, quand dans le mĂȘme temps, autour de soi les gens ne vont pas bien et les choses se dĂ©gradent pour beaucoup?
La catastrophique expérience libérale que nous subissons In vivo tels des rats de laboratoires depuis un moment déja, me fonde à croire que seuls les plus individualistes, les coeurs les plus durs, peuvent se satisfaire d'une situation confortable pour eux au détriment du reste.
Ils ne sont pas nombreux, je l'espĂšre, et notre devoir individualiste, dans le sens oĂč charitĂ© bien ordonnĂ© commence par soi mĂȘme, devrait ĂȘtre de tout faire pour empĂȘcher leur bon plaisir obtenu Ă si grand frais.
Je m'emporte peut ĂȘtre un peu, je dĂ©borde sur la politique, mais le film est traversĂ© par cette Ă©nergie, du moins dans une de ses histoires qui moque les membres de la troĂŻka europĂ©enne et les dĂ©peints en "peine Ă jouir" impuissants.
Le film choisis d'opposer l'imaginaire au rĂ©el, et il ne se restreint pas en la matiĂšre : Plusieurs histoires sont entremĂȘlĂ©es, les narrateurs changent, et l'on passe parfois du coq Ă l'Ăąne (Il y a un coq qui devient narrateur dans le film).
C'est une forme qu'on retrouve dans certains romans anciens et notamment dans le livre les Mille et une Nuits.
Le réalisateur s'est pourtant inspiré d'histoire véridiques, qu'il faisait collecter par une équipe de journalistes, pour ensuite s'en inspirer.
On sent la volonté chez le réalisateur de prendre le pouls de la situation de son pays.
La narration éclatée lui permet de naviguer entre toutes ces situations humaines, et il parvient à capter quelques chose de vrai chez les gens qu'il filme.
Tellement qu'on aurait presque envie qu'il laisse tourner sa caméra, sans s'encombrer des artifices du cinéma.
Le film comporte trois volets, je n'ai pour l'heure vu que le tome 1.
J'ai envie de voir la suite, avec le secret espoir que l'auteur s'efface au profit des gens qu'il filme et Ă qui il rend hommage.
Car le film rentre clairement dans la catégorie "cinéma d'auteur", ce cinéma qui donne souvent de film parfois un peu empesés, ou trop sérieux.
Si le cinĂ©aste parvient Ă dĂ©passer son cadre, il pourrait bien ĂȘtre l'auteur, enfin du premier film d'auteur "populaire" de l'histoire du cinĂ©ma.
J'exagÚre, mais le volume 1 de ce film est un hommage sincÚre aux gens de son pays par Miguel Gomes et c'est l'aspect du film que j'ai préféré.