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Interview
Fran ais, qui tes-vous? (5/5). Ouvriers, cadres, on peut se sentir en haut
ou en bas d une m me classe. Le sociologue Tristan Poullaouec analyse ces
nouvelles strates de la soci t .
Par MARIE-JO LLE GROS
A la question avez-vous le sentiment d appartenir une classe sociale ? , pr
s de la moiti des Fran ais ont r pondu oui. Un tel score a surpris les
chercheurs r unis par l Institut national des tudes d mographiques (Ined) qui
souhaitaient avant tout savoir o les enqu t s se situaient d eux-m mes sur l
chelle sociale. Quelques mois avant cette enqu te, Jean-Pierre Raffarin, alors
Premier ministre, avait voqu la France d en bas . L expression semble avoir
marqu les esprits puisque de nombreux enqu t s l ont reprise leur compte,
souvent avec ironie. Agn s P lage et Tristan Poullaouec en ont d ailleurs tir
le titre de leur chapitre : La France d en bas qu on regarde d en haut .
Entretien avec Tristan Poullaouec, sociologue au Centre nantais de sociologie.
Fran ais moyens , prol taires , France d en haut , existe-t-il une
conscience de classe dans la France d aujourd hui ?
Le sentiment d appartenir une classe sociale a encore du sens pour la moiti
des enqu t s. Mais il ne s agit pas, ou tr s peu, d une conscience de classe au
sens de la vulgate marxiste qui est absente des r ponses. Il s agit plut t d
une impression, celle d appartenir un m me milieu social. Cela dit, la moiti
des enqu t s ont r pondu n gativement et cela vaudrait une autre tude. Pour le
moment, nous ne pouvons qu mettre des hypoth ses : est-ce le refus d une
vision classiste de la soci t manifest essentiellement par les artisans, les
commer ants, les chefs d entreprises et les agriculteurs ? De l indiff rence ?
Ou une impossibilit nommer son appartenance ? Ces pistes seraient
explorer. Certains enqu t s disent ainsi ne pas savoir parce qu ils se sentent
un peu entre deux ou ne trouvent pas le terme .
Quels sont ceux qui ont le plus exprim ce sentiment d appartenance ?
Les cadres sont proportionnellement les plus nombreux prouver ce sentiment,
ainsi que les professions interm diaires. Ces m tiers ont beaucoup chang en
quarante ans. Les cadres d aujourd hui sont de plus en plus qualifi s, dipl m s
et en m me temps, ce sont de plus en plus des salari s ordinaires, qui n ont
pas n cessairement de fonction de direction. Les ouvriers ont eux un sentiment
d exploitation. Quelques-uns se revendiquent encore d une aristocratie ouvri
re, mais de moins en moins. Cela tient notamment au fait que notre soci t d
valorise les savoirs manuels. Aujourd hui, on a le sentiment de devenir ouvrier
parce qu on a chou l cole. Quoi qu il en soit, le sentiment d appartenance
une classe sociale est complexe, il m le toutes sortes d ingr dients, comme
le dipl me, les revenus, l entourage. On peut se dire de classe moyenne pour
le niveau intellectuel et basse pour ce qui touche aux revenus. C est un
sentiment g om trie variable.
La classe moyenne est-elle une r alit ou un fourre-tout ?
36 % des enqu t s ayant un sentiment de classe disent appartenir la classe
moyenne, soit le gros de l chantillon. Mais dire qu on en fait partie, c est
aussi une fa on de neutraliser cette appellation, d euph miser, de se sentir
tout simplement dans la norme, proches des valeurs dominantes. Beaucoup se sont
donc appropri le terme tout en cherchant s en distinguer en compl tant cette
expression leur fa on : la classe moyenne sup rieure , ou basse , ou
responsable , etc. En fait, pour se diff rencier l int rieur de la classe
moyenne, chaque groupe ajoute des strates, affine le curseur. Ce qui nous
conforte dans l id e que la France n est pas qu une vaste classe moyenne
hypertrophi e.
La profession exerc e n en dit-elle pas plus que la classe ?
Effectivement, le sentiment de classe correspond grosso modo aux diff rents
groupes socioprofessionnels d finis par l Insee. Pour les cadres, le sentiment
d appartenance une classe sociale est plut t quelque chose de valorisant, de
flatteur. Dans les classes populaires, les enqu t s ont eux aussi distingu le
haut et le bas , ce qui permet de se d tacher de ceux qui sont vraiment
tout en bas . Ces clivages, aujourd hui renforc s dans les classes populaires,
apparaissent sans doute comme un ph nom ne nouveau.
Qu est-ce qui d finit finalement une classe sociale ?
Ce qui est frappant, c est l importance du niveau d tudes dans les d
terminants de la classe subjective. Les individus ont souvent le sentiment d
tre socialement ce que l cole a d fini pour eux. L exp rience du classement
social est pr coce en France. Et a dure toute une vie. Le parcours scolaire
est d cisif, la fa on dont l cole trie les l ves se refl te dans les repr
sentations de soi. En positif comme en n gatif.
Votre tude n aborde pas le sentiment de d classement social, pourquoi ?
Je ne suis pas s r que le mot fasse sens dans la population. En tout cas, nous
ne l avons pas entendu sur la p riode de l enqu te (2003). Mais dans le d bat
sur le d classement, on retrouve les classes sociales en arri re-plan. En
anglais, ce terme n existe pas. Eventuellement, on parle de gens surdipl m s,
mais pas de classe. En France, les titres scolaires semblent faire cho aux
titres de noblesse de l Ancien R gime. Comme si les positions sociales taient
et restaient fig es une bonne fois pour toutes.
abolir les derniers privil ges
Pour viter la reproduction des lites consanguines il faut abolir l'h ritage.
Une soci t doit conna tre des pisodes r volutionnaires pour que les choses
soient reformat es, exempt es de tout passif et de tout actif.
Mardi 03 novembre 11h07
Niveau d' tudes : une illusion...
Je ne comprends pas comment des gens peuvent d terminer un sentiment
d'appartenance subjective une classe sociale sur la base de leur parcours
scolaire et /ou universitaire. Moi, niveau doctorat et "cadre" dans le priv je
ne me sens rien d'important socialement, car
Mardi 03 novembre 11h05
Eh oui l' ducation nationale dont l'ambition
tait de r duire les in galit s s'est mu e en parfaite reproductrice de ces
derni res. Etre bien n maintenant signifie aujourd'hui avoir des aptitudes
scolaires et des parents connaissant parfaitement les arcanes du syst me. Le
clerg
Mardi 03 novembre 10h29
classes sociales
A peu pres 80% de la population appartient la classe moyenne les 20% restant
sont aux deux extremit s :les plus d munis et les personnes disposants de
revenus lev s . Ce que j'observe c'est qu' l'interieurs des 80% il y a
plusieurs cat gories :
Mardi 03 novembre 09h26