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Surfer sur son lieu de travail, une activit haut risque

LE MONDE | 02.11.09 | 15h16 Mis jour le 02.11.09 | 17h55

Il m'arrive de passer jusqu' une heure par jour sur Facebook au bureau."

Marina, 30 ans, salari e d'une entreprise de plus de 100 personnes, ne fait pas

figure d'exception. De plus en plus de Fran ais s'accordent des pauses Web

entre deux dossiers : un petit tour sur sa messagerie, un achat sur Vente priv

e, une partie de Questions pour un champion... Si pour certains, ces diversions

ne sont pas plus m chantes qu'une longue pause-caf , pour d'autres, elles

conduisent un usage abusif.

Aucune disposition ne r git l'usage d'Internet dans le code du travail. "Dans

l'id al, certaines grandes soci t s adoptent une charte Internet qui d finit

les r gles d'utilisation, explique Eric Rocheblave, avocat sp cialiste en droit

social. Mais bien souvent, les entreprises surveillent d'abord et r gularisent

ensuite."

Perte de productivit , risques de virus et de divulgation de donn es

confidentielles, pour toutes ces raisons, certains employeurs ont choisi de

contr ler les activit s en ligne de leurs salari s. Selon une r cente enqu te

de la revue Smart Business Strategies, 4 entreprises belges sur 10 (panel de

250 entreprises) bloquent l'acc s Facebook. En France, l'employeur peut

galement installer des logiciels de filtrage et surveiller les moindres carts

de souris de ses salari s. Comme le souligne Jean-Emmanuel Ray, professeur de

droit l'universit Paris-I dans la revue Droit social, "l'employ deviendrait

technophobe s'il savait tout ce qu'on peut trouver dans son dossier

lectronique : courriels envoy s et re us, volume et nature des dossiers joints,

connexions l'intranet et Internet, pages lues, imprim es..."

Pour tre dans son droit, l'employeur a cependant l'obligation d'avertir au pr

alable l'employ et le comit d'entreprise de la mise en place de contr les. Et

il lui faut l'autorisation d'un juge pour ouvrir les dossiers et messages

estampill s "personnel". Sans quoi il devient fautif.

En 2001, Nikon avait licenci pour faute grave un salari apr s avoir constat ,

en ouvrant un message personnel, qu'il utilisait Internet des fins priv es.

La Cour de cassation a donn tort la soci t en concluant que "le salari a

droit, m me au temps et lieu de travail, au respect de l'intimit de sa vie

priv e ; que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances".

Pour tenter de trouver le bon quilibre entre contr les l gitimes de

l'entreprise et respect de la vie priv e des employ s, la Commission nationale

de l'informatique et des libert s (CNIL) a mis des recommandations en 2004

dans son rapport "La cybersurveillance sur les lieux de travail". Selon elle,

l'usage de la messagerie et d'Internet des fins non professionnelles doit

tre tol r , sans d passer les limites du "raisonnable". Reste savoir comment

valuer concr tement le "raisonnable".

En mars, la Cour de cassation a tranch en autorisant le licenciement pour

faute grave d'un chef de d p t qui avait surf plus de 40 heures en un mois

des fins personnelles. "Il ne faut cependant pas g n raliser cette sanction,

souligne Eric Rocheblave. L'utilisation est valu e en fonction du poste occup

par l'employ . Par exemple, un employ de bureau, qui dispose en permanence

d'un ordinateur, ne serait peut- tre pas condamn pour 40 heures."

La condamnation d pend galement du contenu des messages envoy s ou des pages

consult es. Ainsi, le t l chargement de photos caract re p dophile est non

seulement r pr hensible, mais peut aussi engager la responsabilit p nale de

l'employeur. La solution id ale reste la cr ation d'une charte Internet,

tablie par la direction des ressources humaines de l'entreprise en

collaboration avec le service informatique. Actuellement, moins de 50 % des

entreprises fran aises disposent de ce type de charte.