Batir ensemble l'avenir du Canada Propositions TABLE DES MATIERES AVANT-PROPOS INTRODUCTION : BATIR ENSEMBLE L'AVENIR DU CANADA PARTIE I : CITOYENNETE COMMUNE ET DIVERSITE 1.1 L'identite canadienne : des valeurs communes 1.2 Droits conferes par la citoyennete selon la Charte 1.3 Reconnaissance du caractere distinct du Quebec 1.4 Les premiers habitants du Canada 1.5 Affirmation de l'identite canadienne dans la Constitution Propositions Annexes PARTIE II : DES INSTITUTIONS RECEPTIVES AU SERVICE D'UN CANADA MODERNE 2.1 Reforme de la Chambre des communes 2.2 Reforme du Senat 2.3 La Cour supreme du Canada 2.4 La formule de modification de la Constitution Propositions PARTIE III : PREPARER UN AVENIR PLUS PROSPERE 3.1 Une union economique plus etroite L'amelioration du commerce et de la mobilite au Canada Le renforcement de l'union economique L'harmonisation des politiques economiques 3.2 Mieux servir les Canadiens 1. La formation de la main- d'oeuvre 2. L'immigration 3. La culture 4. La radiodiffusion 5. Le pouvoir residuel du gouvernement federal 6. Le pouvoir declaratoire du gouvernement federal 7. Reconnaissance des spheres de competences provinciale 8. Rationalisation des services gouvernementaux Delegation de responsabilites administratives Delegation de responsabilites legislatives Candidats a la rationalisation 3.3 Le pouvoir de depenser du federal 3.4 Travailler ensemble Propositions CONCLUSION : COMMENT PARVENIR AU BUT ANNEXE I : LISTE DES PROPOSITIONS Avant-propos Fiers de la terre de leurs aoeux, attaches a leurs valeurs communes, les Canadiens tiennent aussi a leur citoyennete et aux avantages qu'ils en tirent. Mais ils sont maintenant en quete de nouveaux arrangements qui formeraient un projet de pays. En fait, nous voulons tous des changements, pourvu que soit preserve ce qui rend ce pays si attachant, et renforcee sa capacite de faire face aux exigences d'un nouveau monde assailli par la concurrence. Durant l'annee qui vient de s'ecouler, le gouvernement du Canada a elabore des propositions qui serviront a reviser les regles de la vie politique du pays. Plusieurs de ces regles se trouvent dans la Constitution. Pour les changer, il faudra donc apporter a celle-ci des modifications formelles. Mais le present document fait aussi des propositions qui n'exigent pas de changement a la Constitution. Ces propositions visent a circonscrire le dialogue. C'est une invitation lancee aux Canadiens et aux Canadiennes de participer a un veritable renouveau politique. L'objectif est evidemment d'edifier un pays meilleur et plus fort qui reflete nos valeurs et permette d'atteindre nos buts communs dans le respect de notre diversite. Les propositions tendent a mettre en relief certaines realites fondamentales et une idee generale pour orienter le debat. Mais le gouvernement accueillera toute suggestion propre a ameliorer ces propositions. Un Comite mixte special de la Chambre des communes et du Senat a ete mis sur pied afin de permettre aux citoyens de participer au processus de renouvellement. L'entreprise ne peut que profiter d'une large participation. Des commissions parlementaires et des groupes de travail sont aussi a l'oeuvre dans les provinces. De nombreuses initiatives privees sont d'autre part en cours de realisation. Le gouvernement, en preparant ses propositions, a deja beneficie d'un certain apport de la population, notamment les suggestions que des milliers de Canadiens ont adressees au Forum des citoyens sur l'avenir du Canada. Le gouvernement souhaite vivement que les Canadiens examinent avec attention ces propositions et fassent connaitre leurs reactions et leurs opinions. Durant les cinq prochains mois, ils auront acces a une tribune exceptionnelle pour le faire. Quand le pays aura dit ce qu'il en pense, le gouvernement ira resolument de l'avant afin de mettre en oeuvre les changements necessaires pour consolider la federation et preparer un avenir prospere. Introduction Batir ensemble l'avenir du Canada Le Canada d'aujourd'hui est une terre de liberte, de tolerance et de compassion. Notre histoire foisonne de realisations qui remontent a des milliers d'annees, quand les autochtones, premieres societes organisees en Amerique du Nord, occupaient deja le territoire. Il y a pres de cinq siecles, les Europeens y debarquent, suivis de gens venant de toutes les parties du monde. Ils s'y installent et parsement le continent de leurs colonies. Et le pays qu'ils ont bati a grandi. Tant et si bien que le Canada se distingue par la qualite de ses regimes de services sociaux et de soins de sante. Sa reputation de leader du maintien de la paix dans le monde lui vaut le respect et l'amitie des peuples. Son economie est l'une des plus prosperes au monde. Sa croissance lui a fait joindre le cercle des sept principaux pays industrialises. La beaute de son immense territoire constitue un riche patrimoine dont la garde nous a ete confiee pour les generations a venir. Il faut dire que les Peres de la Confederation voyaient grand. En 1867, George-Etienne Cartier exprimait, en effet, sa vision du pays en ces termes : J'espere que ce grand projet de confederation, realise dans les meilleures conditions, produira des resultats aussi satisfaisants que durables. Nous avons scelle notre pacte federal sans effusion de sang et sans qu'il y ait exploitation du faible par le fort. Il a seulement fallu de l'equite et de la justice et certains compromis de part et d'autre. J'espere que s'il faut un jour le modifier, ce ne sera pas pour restreindre les principes d'equite sur lesquels il est fonde, mais pour les etendre encore davantage... Les architectes du Canada en 1867 avaient compris que le federalisme etait la seule voie qui nous permettrait de construire ce pays. Ils y ont vu le meilleur moyen d'allier des elements d'autonomie gouvernementale et de partage de pouvoirs, de sorte que des collectivites differentes puissent vivre et se gouverner en commun sans perdre leur identite. Car non seulement le federalisme laisse-t-il assez de latitude aux regions et aux provinces pour prendre des decisions dans leurs propres domaines, mais il leur permet aussi de realiser des objectifs communs dans d'autres domaines. Voila pourquoi le regime federal canadien a su resister et faire preuve de souplesse en s'adaptant a l'evolution de nos besoins depuis la Confederation. Mais le Canada de cette fin du XXe siecle ne ressemble plus guere au dominion britannique de 1867, ni par le territoire qu'il occupe, ni par sa population, ni par son economie, ni par sa culture. Inchanges a certains egards, ses institutions politiques et son regime federal ont par ailleurs subi de profondes transformations. La Confederation est en grande partie le fruit d'un pacte politique entre deux societes : l'une majoritairement anglophone et protestante, l'autre majoritairement francophone et catholique. La structure federale de 1867 prenait en compte le droit du Quebec a la difference au sein de l'union economique et politique canadienne en prevoyant des dispositions particulieres qui reconnaissaient les traditions linguistiques, culturelles et judiciaires differentes du Quebec. Le pacte initial tenait egalement compte des besoins particuliers de la Nouvelle-Ecosse et du Nouveau-Brunswick en matiere de finances et de transport, et il ouvrait la voie a une nouvelle expansion vers l'ouest par la colonisation. Le Canada a connu par la suite de profondes mutations avant de devenir le pays que nous connaissons aujourd'hui. D'aucuns disent que le pacte conclu a l'origine n'a pas ete entierement respecte. D'autres estiment que l'entente n'a pas ete suffisamment mise a jour pour repondre aux nouveaux besoins. En realite, la teneur de cet accord politique initial a ete considerablement modifiee au cours des 125 dernieres annees par des changements dans les pratiques gouvernementales, des interpretations judiciaires et des modifications apportees a la Constitution. Parmi ces dernieres, celle qui a eu la plus grande portee est sans contredit la Loi constitutionnelle de 1982 qui nous a donne la Charte canadienne des droits et libertes. Plusieurs raisons militent toutefois en faveur d'un nouvel effort de renouvellement de la Constitution. Nos concitoyens autochtones deplorent en effet que la Constitution ne reconnaisse pas adequatement la place toute particuliere qu'ils occupent au sein de la societe canadienne. Apres avoir accompli un progres notable grace a la consecration dans la Constitution de leurs droits ancestraux et les droits issus de traites en 1982, et a une modification couronnee de succes en 1983, les Canadiens autochtones ont vu leurs frustrations s'accroitre par suite de l'echec de trois conferences successives des premiers ministres (1984, 1985, 1987) dont le but etait justement d'inclure dans la Constitution leur droit a l'autonomie gouvernementale. Le Canada doit aussi tenir compte du desir maintes fois exprime par le Quebec d'obtenir la reconnaissance de son caractere distinct, de meme que la maitrise des domaines qui touchent a cette specificite. On a fait aux Quebecois la promesse solennelle, faut-il le rappeler, que s'ils votaient " non " au referendum de 1980 sur la souverainete, le federalisme serait renouvele. Malheureusement, les modifications apportees a la Constitution de 1982 ont ete faites sans le consentement du gouvernement du Quebec et malgre la tres profonde desapprobation manifestee par les deputes de l'Assemblee nationale. Et les efforts deployes, lors de l'Accord du lac Meech, pour ramener le Quebec dans la famille constitutionnelle ont echoue en 1990, faute d'une ratification par toutes les legislatures de la modification approuvee par tous les premiers ministres, comme l'exige la formule de modification de la Constitution. Ces deux evenements suffisent a expliquer a eux seuls pourquoi tant de Quebecois se sont sentis rejetes par le reste du Canada. Par ailleurs de nombreux Canadiens, particulierement dans l'Ouest, mais aussi dans les provinces de l'Atlantique, en Ontario et dans le Nord, sont de plus en plus mecontents de la facon dont fonctionne notre regime federal. Ils reclament des institutions politiques plus sensibles a leurs attentes, plus soucieuses d'integrite et moins portees a la confrontation. Ils veulent des services gouvernementaux plus fonctionnels qui reduisent au minimum les chevauchements. Les Canadiens de toutes les regions du pays reclament un systeme de gouvernement qui soit davantage a l'ecoute des aspirations du pays et qui sache y repondre. Ces pressions de l'interieur s'accompagnent de nouvelles pressions de l'exterieur. Les forces de la globalisation mondiale ont des consequences sur la souverainete des Etats et tendent a augmenter leur interdependance. Meme les plus grands Etats semblent desormais trop petits pour affronter seuls les problemes nombreux que posent l'economie, la securite et l'environnement. Mais, parallelement, on constate un mouvement mondial en faveur de la decentralisation des prises de decisions politiques. Et, comme bien d'autres pays, le Canada est tiraille entre ces deux tendances. Le Canada doit malgre cela trouver la volonte de relever avec ingeniosite les defis economiques du siecle prochain. C'est a cette condition que sera preservee la prosperite du pays et qu'il sera possible d'assurer un niveau de vie eleve aux generations futures. Car pour arriver a reduire les disparites regionales, et demeurer fideles a l'un des grands principes sur lesquels s'appuyait le pacte confederatif, nous devons etre prets a oeuvrer ensemble, dans un climat d'harmonie et d'efficacite. Nous devons avoir une union economique moderne et vraiment fonctionnelle. Le defi majeur des Canadiens consiste donc a construire une meilleure federation prete a entrer dans le XXIe siecle, une federation qui exprime et reflete a la fois la prodigieuse diversite du Canada : terre des premiers habitants du continent et lieu de rencontre de nombreux autres peuples venus d'ailleurs, patrie des deux grandes majorites linguistiques, terre de regions diverses, societe libre et democratique, terre d'egalite respectueuse des differences, union economique puissante, communaute soucieuse de l'egalite des chances et de la securite economique de ses citoyens, et partenaire respecte sur la scene internationale. Le federalisme est le seul regime politique qui saura respecter les caracteristiques de ce pays, telles que l'histoire les a inscrites dans notre conscience collective. Il offre de nombreux avantages sur les autres formes d'union ou d'association politique, et dans un pays aussi etendu et respectueux des nombreuses differences qui font sa richesse, il fait echec a la centralisation excessive, propre aux regimes unitaires. En revanche, une association d'Etats aux liens plus laches ne serait pas assez efficace pour gerer le bien commun du pays et assurer une redistribution equitable des richesses entre les regions. A bien des egards, le defi d'aujourd'hui rappelle celui de 1867. Il faut s'assurer que la federation puisse rassembler les Canadiens dans la realisation d'objectifs communs, sans pour cela restreindre l'authentique diversite du pays. Plus que jamais il nous est demande de concilier efficacement notre besoin d'unite et notre respect de la diversite. Les Canadiens ont reussi a batir ensemble un pays qui compte parmi les grandes reussites de notre epoque. Malgre ses faiblesses, le Canada possede de grandes forces. Certes, nous pouvons le modifier et meme au besoin redefinir en profondeur notre regime federal. Mais nous devons preserver, pour nous et nos enfants, ce que ce pays a de grand. Nous en sommes maintenant a la ronde Canada. Nous devons completer le processus amorce en 1982 en modernisant notre Constitution et nous preparer a aborder le XXIe siecle en nous dotant d'un systeme gouvernemental qui sache repondre aux aspirations de tous les Canadiens. Les bases sont deja la. Ensemble nous pouvons construire un pays a la hauteur de nos aspirations. Partie I Citoyennete commune et diversite Le Canada a ete l'inspiration de mon existence. Je me suis laisse guider par une politique de veritable canadianisme, de moderation et de conciliation. Je m'y suis constamment conforme depuis 1896 et c'est avec confiance que j'invite le peuple canadien tout entier a me soutenir dans l'application de cette politique de canadianisme sense qui fait la grandeur de notre pays... Sir Wilfrid Laurier, 1911 La citoyennete canadienne, c'est un lien emotif, le sentiment de partager certaines valeurs et certains engagements. Une citoyennete commune, c'est l'expression meme de l'appartenance a un meme pays. Il n'est pas necessaire pour autant que les Canadiens soient tous coules dans le meme moule. Liee a des valeurs communes, la citoyennete n'exclut pas le respect des diversites qui nous enrichissent. Bon nombre de Canadiens s'attachent a leur collectivite, a leur langue, a leur region, a leur communaute autochtone, a leur culture distinctive, a leurs racines ethniques. C'est les cas des Quebecois qui se reclament de leur societe distincte. D'autres Canadiens preferent se distinguer d'apres leur sexe, leur occupation, leur religion ou leurs convictions politiques. Mais tous partagent une meme appartenance a un grand pays, et une meme fierte d'etre Canadiens. Le Canada est en effet un pays oy l'on croit a la liberte, a la dignite et au respect, a l'egalite et au traitement equitable et a la possibilite pour chaque citoyen de participer a la vie collective. C'est aussi un pays qui se preoccupe de ceux qui sont desavantages, un pays qui prefere regler pacifiquement les differends. Meme s'il nous arrive de perdre de vue cette facon de vivre, cela ne nous empeche pas, en tant que Canadiens et d'un ocean a l'autre, d'avoir des valeurs essentielles en commun. Au fil des ans, ces valeurs ont ete enoncees de bien des facons et en bien des endroits. Et il y a deja 30 ans que la Declaration canadienne des droits est venue en consacrer plusieurs, notamment en ce qui a trait a la dignite, a la liberte et au respect de la personne. 1.1 L'identite canadienne : des valeurs communes Durant l'annee qui vient de s'ecouler, les Canadiens ont profite des occasions que leur offraient le Forum des citoyens sur l'avenir du Canada, les diverses commissions provinciales et de nombreux sondages prives pour exprimer leur point de vue sur l'identite canadienne. La plupart des intervenants ont exprime une volonte claire de changement, ainsi que leurs frustrations et leur impatience a l'egard du statu quo. Nombreux sont ceux qui, au cours de leurs temoignages aux audiences du Forum des citoyens, ont manifeste leur attachement a une identite canadienne qui nous distingue des citoyens des autres pays. Ils disent avoir le sentiment profond de partager un ensemble de valeurs avec tous les Canadiens : ils croient que l'egalite et l'equite doivent etre les principes directeurs de notre societe et ils croient a la consultation et au dialogue pacifique, a l'importance de la conciliation et de la tolerance, au respect de la diversite, a la necessite de faire preuve de compassion et de generosite, a la valeur de la beaute naturelle du Canada et a l'importance d'une conscience collective qui nous pousse a contribuer a la paix et au developpement dans le monde. Les Canadiens nous ont dit qu'ils tiennent a leur citoyennete. Pour plusieurs nouveaux venus en ce pays, le Canada a ete, comme pour les premiers explorateurs et pionniers de ce pays, une terre de liberte personnelle, de victoire sur les privations et la faim. Ces nouveaux venus ont fui de vieilles oppressions et se sont mis a la recherche de nouvelles possibilites. Et ils ont decouvert que le Canada offre assez d'espace pour que tous puissent respirer a l'aise. Il est vrai que l'avenement de ce pays n'a pas eu lieu sans douleur et sans souffrance. Les autochtones, en particulier, ont paye cherement la recherche de liberte des autres peuples. Le Canada n'a pas toujours ete accueillant pour les etrangers et nombreux sont ceux qui n'ont jamais pu profiter des avantages de la citoyennete. Malgre ces lacunes, que nous ne faisons que commencer a reconnaitre et a essayer de corriger, notre pays demeure un symbole de liberte dans son sens le plus large. Et ils sont nombreux dans le monde a souhaiter ardemment venir s'etablir ici et partager avec nous ce que nous avons bati. Car dans bien des pays, des gens risquent encore leur vie et sacrifient leur securite pour jouir des libertes que les generations precedentes nous ont leguees en ce pays. Mais par dela l'absence de toute oppression, la citoyennete signifie egalement le droit de participer a la vie du pays. Et nos droits democratiques sont si importants pour nous que nous devons continuellement chercher a les etendre et a les ameliorer. Meme au Canada, les droits democratiques des femmes, des autochtones et de certains groupes ethniques n'ont ete assures qu'apres une longue lutte. Nous devons demeurer vigilants et avoir a coeur d'ameliorer notre democratie et de veiller a ce que tous les membres de la societe puissent participer a la vie de ses institutions. Depuis sa creation, qu'il s'agisse de democratie, de liberte ou des regles de droit, le Canada s'est en fait dote progressivement d'une facon unique de se gouverner et de nouer des relations entre le citoyen et l'Etat. Que ce soit par ingeniosite ou par necessite, les architectes du Canada ont etabli un cadre qui nous a permis de batir un pays qui a su reconcilier de facon typiquement canadienne les valeurs universelles, de liberte, d'egalite, de compassion et d'entraide communautaire. 1.2 Droits conferes par la citoyennete selon la Charte En 1982, la protection des droits fondamentaux des Canadiens a pris un tournant important grace a l'insertion de la Charte canadienne des droits et libertes dans la Constitution. Depuis ce temps, nos libertes fondamentales ne sont plus seulement enoncees dans des conventions et des lois qui peuvent etre modifiees par le Parlement ou par les assemblees legislatives. Elles sont maitenant inscrites dans la Constitution. Et la Charte prescrit que les lois ne peuvent restreindre les libertes que dans des limites raisonnables. Ce qui veut dire que les droits et libertes de la personne ne sont limites que par la necessite pour tous de jouir des memes droits et libertes. La Charte contient diverses mesures de protection de l'egalite qui repondent aux aspirations des Canadiens. Selon la Cour supreme, le but des droits a l'egalite est de remedier a la discrimination contre les groupes qui sont desavantages sur les plans social, politique ou juridique, ou d'empecher cette meme discrimination. Au pays, de nombreux groupes ont du ou doivent encore surmonter de formidables obstacles pour faire partie de notre societe et etre acceptes pour ce qu'ils sont. Ceux qui souffrent d'un handicap physique ou mental, les peuples autochtones, les minorites visibles, les groupes minoritaires de l'une des langues officielles et certains autres doivent relever des defis que le reste de la societe ne comprend pas toujours. Le but de l'egalite n'est pas d'en arriver a un traitement egal pour tous. Les droits a l'egalite visent plutot l'egalite des chances pour les personnes ou les groupes desavantages en debarrassant les lois de leurs distinctions discriminatoires. En fait, la Cour supreme a declare que la reconnaissance des differences est l'essence meme de la vraie egalite. Dans l'histoire de notre pays, il n'a jamais ete suffisant de ne proteger que les droits universels des individus. Ici, la Constitution et les lois protegent aussi les droits accordes aux personnes en tant que membres de certaines collectivites. Cette conciliation des deux genres de droits donne a notre Constitution un caractere unique et une valeur typiquement canadienne : celle d'une egalite qui admet les differences. L'existence des droits collectifs et des droits individuels dans une meme constitution, la notre, est en effet au coeur meme du projet canadien. Le gouvernement du Canada reaffirme categoriquement son adhesion aux droits garantis par la Charte. Et comme la Charte ne garantit pas le droit a la propriete, le gouvernement du Canada est d'avis qu'il faut modifier la Charte canadienne des droits et libertes pour qu'elle garantisse ce droit. La Charte reconnait que les droits et libertes qu'elle garantit sont soumis a des limites raisonnables correspondant aux valeurs d'une societe libre et democratique. Car il faut parfois limiter les droits d'une personne s'ils entrent en conflit avec les droits et les interets d'autres personnes ou de la collectivite dans son ensemble. La liberte d'expression, par exemple, ne va pas jusqu'a justifier la diffamation ou la propagande haineuse, et nos tribunaux sont appeles a jouer un role crucial dans l'etablissement de ce genre d'equilibre. Une autre limitation decoule du recours a une clause derogatoire incluse dans la Constitution en 1982 au moment oy la Charte canadienne des droits et libertes y a ete inscrite. Cette clause derogatoire est communement appelee " clause nonobstant " (l'article 33). Elle permet aux legislatures federale et provinciales de supprimer certaines dispositions de la Charte moyennant une loi ordinaire adoptee a majorite simple par leur assemblee legislative. Cette derogation reste en vigueur pendant cinq ans, au terme desquels elle expire ou doit etre renouvelee par l'assemblee legislative en question. Cette clause est vivement contestee. Ses adversaires affirment qu'elle dilue la garantie des droits inscrits dans la Charte, le Parlement et les assemblees legislatives pouvant se soustraire a la portee de nombre de ces droits (mais pas tous) quand ils le jugent necessaire. L'argument contraire, avance par ceux qui ont insiste pour que cette disposition soit incluse dans la Charte lors de son adoption en 1982, soutient qu'il est entierement indique que ce soient nos representants elus, plutot que des juges, qui soient les arbitres supremes des politiques de l'Etat et des besoins de la societe. La clause derogatoire fut donc le resultat d'un compromis politique. Si elle n'existait pas, les juges nommes a la Cour supreme du Canada pourraient determiner non seulement la portee de tous les droits, mais aussi les limites pouvant s'appliquer aux politiques de l'Etat. Tout bien considere, une clause derogatoire demeurera, mais le gouvernement du Canada est d'avis que le recours a cette disposition devrait etre regi par des conditions plus strictes. Il propose donc que le pourcentage des votes requis pour invoquer la clause derogatoire de la Charte soit hausse d'une majorite simple a 60 pour 100 des membres de l'assemblee legislative ou du Parlement du Canada. 1.3 Reconnaissance du caractere distinct du Quebec J'ai toujours soutenu que si nous pouvions nous entendre pour avoir un seul gouvernement et un seul parlement, qui legifererait pour l'ensemble de ces populations, ce serait la le meilleur regime de gouvernement que nous puissions adopter. Mais, ... nous nous sommes rendu compte que c'etait impossible ... le peuple du Bas-Canada ne l'accepterait pas ... (ayant) une langue, une nationalite et une religion differentes de celles de la majorite ... on a constate que toute proposition susceptible de se traduire par l'absorption de l'individualite du Bas-Canada ... serait mal recue par sa population. Nous avons donc ete forces de conclure qu'il nous fallait concevoir un systeme d'union politique dans lequel les differentes organisations provinciales seraient preservees dans une certaine mesure. Sir John A. Macdonald, 1865 Reconnaitre le caractere distinct de la societe quebecoise, c'est reconnaitre une realite politique et sociologique. En fait, le Parlement britannique a rompu avec la politique qu'il appliquait a toutes ses autres colonies et a accorde au Quebec, par l'Acte de Quebec de 1774, le droit de conserver sa langue, sa religion, son droit civil, son regime seigneurial, bref sa facon de vivre a la francaise, et de former ainsi une societe distincte au sein du Canada. Cette societe distincte existe depuis plus de 200 ans. Cette reconnaissance du caractere distinct de la societe quebecoise, fruit du realisme politique de la Grande-Bretagne, ne s'est pas faite sans heurts. En 1867, place devant l'evidence que le Haut et le Bas-Canada ne pouvaient etre unis legislativement, et suite a l'echec du plan irreflechi visant a assimiler les Canadiens francais sous l'Acte d'Union de 1840, le pays a opte pour un compromis ingenieux : l'adoption d'un systeme federal destine a reconcilier d'une part le droit a la difference des provinces (particulierement du Quebec) et d'autre part, les mises en commun necessaires a l'edification d'une union economique et d'un pays transcontinental, dynamique et distinct des Etats-Unis. Pour y arriver, il fut decide lors de la Confederation de remettre en vigueur des articles importants de l'Acte de Quebec et de donner au Quebec le pouvoir d'assurer la preservation et la promotion de sa langue et de sa culture au sein de la nouvelle federation. Depuis 1867, le Canada a toutefois change. Les identites regionales se sont multipliees et renforcees et les immigrants de partout dans le monde ont donne plus de vigueur au caractere multiculturel du pays, tant au Quebec qu'a l'exterieur de la province. Tout en proclamant son ouverture aux forces de la mondialisation et en reaffirmant sa volonte de garantir dans la Constitution les droits de sa communaute anglophone et de ses minorites ethniques, le Quebec demande de moderniser la Constitution afin qu'elle reflete les realites actuelles, tout en respectant le pacte initial de la Confederation. Le Quebec demande que la Constitution tienne compte du caractere distinct de la province a titre de seule societe majoritairement de langue et de culture francaises au Canada et en Amerique du Nord. La Charte canadienne des droits et libertes contient deja plusieurs dispositions, notamment l'article 25 touchant les autochtones et l'article 27 concernant notre patrimoine multiculturel, qui reconnaissent l'importance de composantes particulieres de la societe canadienne. Ces articles sont destines a servir de guides pour l'interpretation de la portee et des limites des dispositions de la Charte. Il est anormal que la Charte ne contienne actuellement rien de semblable concernant le Quebec malgre son caractere distinct. Le gouvernement du Canada propose donc que la Charte canadienne des droits et libertes soit interpretee d'une maniere compatible avec la preservation et la promotion au Quebec d'une societe francophone dynamique qui protege la qualite et l'influence du francais en tant qu'expression de sa culture et comme langue principale de travail, d'enseignement, de communication, du commerce et des affaires dans cette province. Et la definition qu'il propose de la societe distincte a pour but de faire ressortir les elements evidents du caractere distinct du Quebec. En outre, reconnaissant que la dualite linguistique constitue une caracteristique fondamentale du Canada, le gouvernement du Canada est d'avis que toute interpretation de la Charte devrait aussi concorder avec la preservation de l'existence des Canadiens d'expression francaise et des Canadiens d'expression anglaise a l'echelle du pays, les premiers majoritaires au Quebec et les seconds majoritaires a l'exterieur du Quebec. 1.4 Les premiers habitants du Canada Longtemps avant l'arrivee des Europeens, le territoire qui forme aujourd'hui le Canada etait occupe par les peuples autochtones, dont la langue, les traditions et les cultures se sont developpees et enrichies. Ce role de premier plan qu'ont joue les autochtones dans l'histoire du Canada constitue un element vital de l'identite canadienne. De plus en plus, l'echange de points de vue entre autochtones et non-autochtones est considere comme une source d'enrichissement qu'il faut savoir apprecier et admirer, et qui doit etre preservee dans un esprit de respect mutuel. On se rend maintenant compte, plus que jamais auparavant, de l'urgence d'assurer aux peuples autochtones du Canada leur place legitime dans la societe canadienne. Bien que les tentatives destinees a resoudre les problemes aient abouti a des echecs decevants, des progres notables ont ete accomplis dans la recherche d'une plus grande comprehension mutuelle. Nous avons maintenant l'occasion de regler ces questions et d'etablir solidement les bases du genre d'avenir auquel aspirent les premiers peuples du Canada. Comme tous les Canadiens, les autochtones veulent que la Constitution reflete leur vision du Canada et definisse la place qui leur revient dans la federation canadienne. L'actuelle reforme constitutionnelle vise a creer des conditions qui aideront les collectivites autochtones a atteindre leur plein potentiel au sein du Canada. Les autochtones doivent prendre part au processus L'article 35.1 de la Loi constitutionnelle de 1982 enonce le principe suivant : les gouvernements doivent faire participer les peuples autochtones aux discussions relatives aux modifications constitutionnelles qui les concernent directement. Le debat constitutionnel qui s'amorce traitera de questions qui concernent directement les peuples autochtones du Canada. En tant que premiers habitants du Canada, les peuples autochtones doivent avoir un role a jouer dans le processus constitutionnel qui determinera l'avenir du pays. Le droit des peuples autochtones a l'autonomie gouvernementale devrait etre reconnu dans la Constitution Les peuples autochtones se gouvernaient deja eux-memes au moment de leurs premiers contacts avec les Europeens. Toutefois, leurs pouvoirs a cet egard ont ete considerablement erodes par les empietements des non-autochtones et par plus d'un siecle de paternalisme sous le regime de la Loi sur les Indiens. Si on leur accordait le pouvoir de se gouverner eux-memes a l'interieur de la federation canadienne, de nombreux instruments et methodes d'intervention federale qu'on trouve dans la Loi sur les Indiens deviendraient inutiles. Cela contribuerait largement a maintenir le caractere distinct et les droits collectifs des peuples autochtones. Les Inuit, qui vivent dans les regions les plus septentrionales du pays, consacrent depuis quelque temps beaucoup d'efforts aux negociations complexes et detaillees qui entourent leurs revendications territoriales. Ils veulent accroitre leur autonomie politique dans le systeme gouvernemental et faire inscrire dans la Constitution leur droit a l'autonomie gouvernementale. Ils voient aussi dans la creation du territoire de Nunavut un moyen d'atteindre cet objectif. Les Metis, pour leur part, ont joue un role primordial dans le developpement de l'Ouest canadien. On les appelle souvent le peuple oublie du Canada; le gouvernement canadien s'engage a aborder la question des roles et responsabilites appropries des gouvernements concernant les Metis. Les gouvernements provinciaux ont generalement approuve l'idee de conclure avec les autochtones des arrangements ayant trait a leur autonomie gouvernementale. La nature et la portee de la reconnaissance de ce principe dans la Constitution sont toutefois fort controversees. Le gouvernement du Canada propose de modifier la Constitution de maniere a consacrer un droit a l'autonomie gouvernementale autochtone invocable devant les tribunaux afin de reconnaitre l'autorite des autochtones sur leurs propres affaires au sein de la federation canadienne. Comme les tribunaux seront eventuellement appeles a se prononcer sur cette question, le gouvernement du Canada propose d'adopter deux mesures importantes qui serviront de cadre a l'exercice de ce droit. En premier lieu, il sera important de definir la nature de ce droit dans des termes qui aideront les tribunaux a donner une interpretation de l'autonomie gouvernementale compatible avec l'idee que s'en font les autochtones et les non-autochtones. Par exemple, ce droit permettrait de tenir compte des situations differentes dans lesquelles se trouvent les peuples autochtones du Canada et de leurs besoins particuliers, et il serait exerce dans le cadre constitutionnel canadien et assujetti a la Charte canadienne des droits et libertes. De nombreuses lois federales et provinciales d'application generale resteraient en vigueur. En second lieu, meme si la nature generale de ce droit etait definie dans la Constitution, il sera essentiel de s'assurer que chacun comprenne bien la relation precise entre les gouvernements autochtones et non autochtones. Pour cette raison, et afin que la transition s'effectue harmonieusement, le gouvernement du Canada propose : -que les gouvernements s'engagent a negocier des ententes d'autonomie gouvernementale avec les peuples autochtones; -que l'on tienne regulierement des conferences des premiers ministres a ce sujet; -que ce droit ne devienne executoire qu'apres une periode maximale de 10 ans a partir de la date d'adoption de la modification; -que durant cette phase initiale, les negociations se poursuivent et que les accords conclus recoivent aussitot une protection constitutionnelle. Apres la periode de transition, le droit a l'autonomie gouvernementale pourrait devenir pleinement executoire. En pratique toutefois, on s'attend a ce que la nature precise et la portee exacte de l'autorite ainsi conferee aux autochtones soient definies au terme de negociations avec les communautes autochtones. Dans le contexte de la federation canadienne, les administrations gouvernementales autochtones pourraient eventuellement exercer une combinaison de competences appartenant actuellement aux administrations federale, provinciales et municipales malgre le fait que plusieurs lois federales et provinciales de portee generale continueraient a s'appliquer. Selon les besoins et la situation de chaque groupe autochtone, la juridiction des gouvernements autochtones pourrait inclure un grand nombre de champs de competences dont l'utilisation des terres et des ressources, la langue et la culture, l'education, les services de police et l'administration de la justice, la sante, le developpement social et economique et les infrastructures communautaires. Un processus constitutionnel concernant les questions autochtones Etant donne qu'il ne sera pas possible de regler toutes les questions liees au dossier autochtone au cours de la periode prevue pour ce processus, le gouvernement du Canada estime qu'il conviendrait d'inscrire dans la Constitution l'obligation de mener a terme, dans des delais raisonnables, un processus constitutionnel destine aux questions autochtones en suspens. Les ministres et les leaders autochtones devraient aussi utiliser ce forum pour suivre de pres les progres accomplis au cours des negociations sur l'autonomie gouvernementale. La representation des autochtones au Senat Certains pays ont pris des dispositions speciales pour que leurs peuples autochtones soient representes dans leurs assemblees legislatives. Les peuples autochtones du Canada ont toujours ete sous- representes dans nos institutions politiques federales. Cette situation est inacceptable et doit etre corrigee. En consequence, le gouvernement du Canada propose de garantir la representation des autochtones dans un Senat reforme. 1.5 Affirmation de l'identite canadienne dans la Constitution Une constitution obeit a deux fonctions essentielles. L'une est juridique, l'autre est symbolique. Elle fixe les regles d'apres lesquelles un peuple se gouverne. Mais elle ne sera vraiment complete que si elle fait comprendre aussi le bien-fonde de ces regles, les valeurs qui les sous-tendent, les grands objectifs et les traits dominants du peuple auquel s'adresse le document. Les Canadiens devraient donc pouvoir se reconnaitre dans la constitution du pays oy ils sont nes ou qu'ils ont choisi. Ce second element symbolique est particulierement faible dans la Constitution du Canada. Le preambule de la Loi constitutionnelle de 1867 mentionne bien que quatre provinces desiraient former ensemble une federation appelee le Canada, avec un systeme parlementaire de gouvernement reposant sur les memes principes que celui du Royaume-Uni. La Charte canadienne des droits et libertes, qui sert d'introduction a la Loi constitutionnelle de 1982, contient en preambule une clause affirmant que le Canada " est fonde sur des principes qui reconnaissent la suprematie de Dieu et la primaute du droit ". Aucun de ces preambules ne definit reellement qui nous sommes en tant que peuple et ce a quoi nous aspirons. Le gouvernement du Canada propose qu'une " clause Canada " soit incorporee dans la Constitution afin d'y affirmer l'identite et les aspirations du peuple canadien. Le gouvernement du Canada estime que cet enonce, qui serait consacre dans l'article 2 de la Loi constitutionnelle de 1867, devrait inclure les caracteristiques et les valeurs suivantes : -une federation dont l'identite se nourrit des caracteristiques particulieres a chaque province, aux territoires et aux collectivites; -l'egalite des femmes et des hommes; -l'attachement des Canadiens aux principes d'equite, d'ouverture et de pleine participation de tous les citoyens a la vie de leur pays, quelles que soient leur race, leur couleur, leurs croyances, leur condition mentale ou physique ou leur culture; -la reconnaissance de l'autonomie gouvernementale des peuples autochtones comme fait historique et la reconnaissance de leurs droits au sein du Canada; -la reconnaissance de la responsabilite des gouvernements de preserver les deux majorites et minorites linguistiques du Canada; -la responsabilite particuliere qui incombe au Quebec de proteger et de promouvoir sa societe distincte; -la contribution de peuples d'origines culturelles et ethniques diverses a l'edification d'un Canada fort; -l'importance de la tolerance, tant pour les individus que pour les groupes et les collectivites; -un engagement a l'egard de l'objectif du developpement durable compte tenu de l'importance du territoire, de l'air et de l'eau et de la responsabilite que nous avons de les preserver et de les proteger pour les generations futures; -le respect des droits individuels et collectifs tels qu'enonces dans la Charte canadienne des droits et libertes; -la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux dans l'ensemble de l'union economique canadienne, et le principe de l'egalite des chances dans l'ensemble du Canada; -l'engagement envers le bien-etre de tous les Canadiens; -l'attachement a un regime de gouvernement parlementaire democratique; -l'equilibre typiquement canadien entre les libertes individuelles et collectives d'une part et, d'autre part, les responsabilites individuelles et collectives que nous partageons tous. Propositions 1. Reaffirmation des droits et libertes des citoyens. Le gouvernement du Canada reaffirme le principe selon lequel les droits fondamentaux enonces dans la Charte constituent un element essentiel de la Constitution canadienne. Le gouvernement du Canada propose que la Charte canadienne des droits et libertes soit modifiee de maniere a garantir le droit a la propriete. Le gouvernement du Canada propose egalement que la proportion de votes necessaire au Parlement ou a une assemblee legislative provinciale pour invoquer la disposition derogatoire (article 33) ne soit plus la majorite simple, mais une majorite de 60 pour 100 des deputes du Parlement ou de l'assemblee legislative. 2. Reconnaissance du caractere distinct du Quebec et de la dualite linguistique du Canada. Le gouvernement du Canada propose que soit insere dans la Charte un article prescrivant que la Charte canadienne des droits et libertes soit interpretee de facon a respecter le caractere distinct du Quebec au sein du Canada. L'article se lirait comme suit : 25.1 (1)Toute interpretation de la Charte doit concorder avec : a) la protection et la promotion du caractere de societe distincte du Quebec au sein du Canada; b) la protection de l'existence de Canadiens d'expression francaise, majoritaires au Quebec mais presents aussi dans le reste du pays, et de Canadiens d'expression anglaise, majoritaires dans le reste du pays mais presents aussi au Quebec. (2)Pour l'application du paragraphe (1), une societe distincte comprend notamment : a) une majorite d'expression francaise; b) une culture unique en son genre; c) une tradition de droit civil. [Voir des extraits de la Charte a l'annexe a la fin de la Partie I : les articles 1, 25 (le nouvel article 25.1 y compris), 27, 28 et 31.] 3. Participation des autochtones aux deliberations constitutionnelles en cours. Le gouvernement du Canada entend s'assurer que les peuples autochtones participent aux deliberations constitutionnelles en cours. 4. Autonomie gouvernementale des autochtones. Le gouvernement du Canada propose de modifier la Constitution de maniere a consacrer un droit general a l'autonomie gouvernementale autochtone au sein de la federation canadienne qui serait invocable devant les tribunaux et sujet a la Charte canadienne des droits et libertes, la nature de ce droit etant decrite de facon a en faciliter l'interpretation par les tribunaux. Afin d'aider le gouvernement du Canada, les gouvernements des provinces et des territoires et les peuples autochtones a s'entendre sur la teneur de ce droit, il ne deviendrait executoire qu'apres une periode maximale de 10 ans. Le Comite mixte special devrait se pencher sur les parametres generaux du droit qui sera inscrit dans la Constitution ainsi que sur les competences qu'exerceront les administrations gouvernementales autochtones. 5. Processus constitutionnel autochtone. Le gouvernement du Canada propose d'inscrire dans la Constitution un processus constitutionnel particulier pour le traitement des dossiers autochtones qui ne seront pas abordes pendant l'actuelle ronde de discussions constitutionnelles et de suivre de pres les progres accomplis dans les negociations sur l'autonomie gouvernementale. 6. Representation des peuples autochtones au Senat. Le gouvernement du Canada propose que la representation des autochtones soit garantie au sein d'un nouveau Senat. 7. Clause Canada dans la Constitution. Le gouvernement du Canada propose d'inserer a l'article 2 de la Loi constitutionnelle de 1867, une " clause Canada " enoncant ce que nous sommes en tant que peuple et ce a quoi nous aspirons. Le gouvernement du Canada croit que cette clause devrait faire etat des caracteristiques et des valeurs canadiennes suivantes : -une federation dont l'identite se nourrit des caracteristiques particulieres a chaque province, aux territoires et aux collectivites; -l'egalite des femmes et des hommes; -l'attachement des Canadiens aux principes d'equite, d'ouverture et de pleine participation de tous les citoyens a la vie de leur pays, quelles que soient leur race, leur couleur, leurs croyances, leur condition mentale ou physique ou leur culture; -la reconnaissance de l'autonomie des peuples autochtones comme fait historique et la reconnaissance de leurs droits au sein du Canada; -la reconnaissance de la responsabilite des gouvernements de preserver les deux majorites et minorites linguistiques du Canada; -la responsabilite fondamentale qui incombe au Quebec de proteger et de promouvoir sa societe distincte; -la contribution de peuples d'origines culturelles et ethniques diverses a l'edification d'un Canada fort; -l'importance de la tolerance, tant pour les individus que pour les groupes et les collectivites; -un engagement a l'egard de l'objectif du developpement durable compte tenu de l'importance du territoire, de l'air et de l'eau et de la responsabilite que nous avons de les preserver et de les proteger pour les generations futures; -le respect des droits individuels et collectifs tels qu'enonces dans la Charte canadienne des droits et libertes; -la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux dans l'ensemble de l'union economique canadienne, et le principe de l'egalite des chances dans l'ensemble du Canada; -l'engagement envers le bien-etre de tous les Canadiens; -l'attachement a un regime de gouvernement parlementaire democratique; -l'equilibre typiquement canadien entre les libertes individuelles et collectives d'une part et, d'autre part, les responsabilites individuelles et collectives que nous partageons tous. Annexe Reconnaissance du caractere distinct du Quebec dans la charte Voici le texte des articles 1, 25, 27, 28 et 31 et l'article 25.1 propose : 1. La Charte canadienne des droits et libertes garantit les droits et libertes qui y sont enonces, dans des limites raisonnables prescrites par la loi et dont la justification peut se demontrer dans le cadre d'une societe libre et democratique. 25.Le